• Chapitre 55 : Suis-je...?

    Chapitre 55 : Suis-je...?

     

    La montre Diesel que j'ai au poignet m'indique qu'il est presque 18 heures lorsque nous arrivons à la porte, sur laquelle il y a un panneau avec ‘Résidence Phumipat’ écrit dessus. Maintenant que j'y pense, je ne suis pas venu ici depuis un bon moment. Je me souviens que vers la fin de l'année dernière, je venais presque tous les jours. Penser à cette époque me donne la chair de poule. Je regarde toutes les fleurs de jasmin orange qui fleurissent autour de la porte du manoir. Elles sentent merveilleusement bon. D'un autre côté, Phun essaie toujours de déverrouiller la petite porte en s'agitant avec les clés. Il a un tas de sacs en plastique dans ses mains. Ils contiennent toutes les choses que nous avons achetées au supermarché. (Je porte déjà la moitié des choses que nous avons achetées. Je me demande s'il a acheté tout ça pour Nong Pang ou pour lui-même. Il y a une tonne de choses  ici.)

    "P'Phun !" En parlant de ça, la voilà. (Être médium doit être une affaire de famille.) Je suis pris au dépourvu et je dois faire un pas en arrière quand j'entends la voix enjouée qui crie pour son frère aîné venant d'un buisson. Nong Pang surgit et elle voit que Phun n'est pas rentré seul à la maison.

    "P'Noh !"

    Ceci est un message pour les résidents de Thong-Lor. Si vous ressentez un tremblement de terre, ne paniquez pas. C'est juste Nong Pang qui hurle à tue-tête comme si elle avait trouvé un trésor caché. (Je veux dire, je suis un trésor. Hehe. Hein ? Quelles ordures ? J'ai dit un trésor, pas des ordures !) Non seulement elle est bruyante, mais elle se projette pour s'accrocher à moi comme si elle était un koala en plus !

    "Alors j'ai entendu dire que tu ne révisais pas pour tes examens ?" Je décide de gronder le mignon koala maintenant que j'ai la chance de la voir. La petite sœur de Phun gonfle ses joues et regarde son frère. "Tu m'as dénoncée ?!" C'est lui qui se fait gronder à la place maintenant. Ha ha ha.

    "Je ne t'ai pas dénoncée, je lui ai juste fait savoir... que tu es une tête de noeud. Alors, est-ce que tu vas réviser pour tes examens ce soir ?"

    "Mais American Dad passe sur TrueVisions ce soir et je veux vraiment le regarder." Ah, c'est pourquoi Phun a passé des heures à chercher le parfait dessert à la Villa aujourd'hui.

    En réalisant cela, j'ai un énorme sourire sur mon visage sachant que nous avons toutes les cartes en main. Je regarde Phun alors qu'il sort notre arme secrète. "Ça veut dire que tu ne veux pas de ça alors ?" Ta-da ! C'est un gâteau à la mousse au chocolat ! C'est un gâteau doux et crémeux de chez Mousses & Meringues. Phun affirme qu'à chaque fois que Nong Pang passe devant cette boulangerie, elle ne peut s'empêcher de s'y arrêter et de ramener au moins deux morceaux de gâteau à la maison. Tout ce qu'elle a à faire, c'est de rester à la maison et de lire (des manuels), puis elle pourra déguster le délicieux gâteau sans avoir à quitter la maison !

    En échange, elle doit renoncer à regarder la série télévisée (TrueVisions les rediffuse au moins 3 ou 4 fois par semaine de toute façon) et étudier pour ses examens. C'est aussi simple que cela. (Mais si j'étais elle, je volerais les gâteaux et les mangerais en regardant la télévision. C'est simple également)

    "P'Phun, P'Noh. Vous me faites vraiment ça...?" Hé, hé. Ne me mets pas dans le même sac que lui ! Ton frère est le responsable de ce plan méprisable. Il a aussi payé lui-même. Je n'ai rien à voir avec tout ça. (Parce que je n'ai même pas assez d'argent pour acheter des Clorets (1) à mâcher après avoir dîné.)

    J'ai un sourire éclatant et j'abîme avec tendresse les tresses de la jeune fille qui se tient devant moi. "Va étudier. On pourra jouer à quelques jeux ensemble après."

    "Vraiment ?! Alors si je finis de lire 6 chapitres, tu joueras avec moi ?!"

    "Oui, mais je ne reste que jusqu'à huit heures alors tu ferais mieux de t'y mettre." Je lui donne une heure limite et la petite sœur de Phun rayonne de joie avant qu'elle ne court chercher la PSP sur laquelle elle jouait tout à l'heure et entre dans la maison. (Hey, elle est un peu comme moi.) Et Phun la rappelle à l'ordre.

    "Et fais aussi l'examen pratique à la fin de chaque chapitre, Pang ! Je vais les corriger pour toi !"

    "Oui !"

    Elle est tellement pressée qu'elle se précipite contre la porte de sa propre maison. Je ris de la bizarrerie de la petite sœur de Phun. Puis, le fils aîné du manoir murmure quelque chose. "Pourquoi ai-je pris la peine d'acheter un gâteau alors que tu fais un meilleur appât ?"

    Eh bien, bien sûr. Je suis incroyablement séduisant. Hahaha.

    Maintenant que Nong Pang a accepté de partir pour étudier, nous restons tous les deux pour discuter un moment avec l'oncle Nhun, qui arrose le jardin. Mais simplement bavarder ne suffit pas pour un adolescent énergique comme moi. Puisque nous sommes déjà ici avec l'oncle Nhun, je lui propose de l'aider à arroser le jardin. Hé, hé, hé. Et ce qui se passe ensuite ne me surprend pas. Le tuyau d'arrosage est aussi odieux que le fils de son manoir. Je le dis juste comme ça. Je le tape pour projeter de l'eau en m'attendant à ce qu'il fonctionne comme il le devrait. Mais non, ce satané tuyau m'asperge d'eau à la place ! (Putain de... tuyau. Je ne sais pas comment je devrais l'appeler.) Phun me dit que je suis nul en physique. (Ça a un rapport avec ça ?) Ne croyez pas que quelqu'un comme Noh va se rendre. Plus on me reproche d'être stupide en physique (ça a donc un rapport avec ça, après tout ?), plus je me sens... stupide. (Alors pourquoi en parler ?) Quel tuyau d'arrosage indiscipliné ! Je ne peux pas contrôler ce tas de ferraille. Ensuite, il s'attaque au beau gosse (qui râle beaucoup). Pendant tout ce temps, il me donnait une conférence sur la pression et la friction de l'eau ou quelque chose du genre juste à côté de moi. Ha ha ha, maintenant ton short est tout mouillé !

    Mais je crois que j'en fais assez.  Je suis trempé maintenant. Je veux dire que si le tuyau d'arrosage est capable de trahir son propriétaire, rien ne l'empêche d'attaquer un visiteur comme moi. De plus, la dernière chose que je veux, c'est d'avoir une démangeaison à l'entre-jambe.  Je décide d'agiter un drapeau blanc et de rendre le tuyau d'arrosage à l'oncle, également connu sous le nom de "Le tueur (de tuyaux)". Phun et moi partons en argumentant pour savoir à qui incombe la faute. (Je pense que c'était sa faute. S'il est si doué en physique, pourquoi n'a-t-il pas calculé que la zone où il se tenait était un mauvais endroit) ?

    Nous nous disputons pendant un moment jusqu'à ce que nous arrivions dans le hall principal du manoir. De là, on peut voir le salon. Phun s'arrête immédiatement. De l'eau s'écoule de nos shorts et de nos chaussettes.

    "Papa..."

    "Qu'est-ce que tu racontes maintenant ? Tout ce que je dis, c'est que personne ne t'a dit de rester là. Je t'ai déjà dit que je ne savais pas comment utiliser ce tuyau, alors pourquoi as-tu insisté... Attends, quoi ?!" Je sursaute au milieu de mon discours quand je réalise enfin ce qui se passe autour de moi.

    "Phun, tu es rentré ?" La voix de cet homme valide ma stupidité. Je lève rapidement les mains pour le saluer. Ah… c'est mauvais.

    "B-bonjour".

    "Bonjour, Noh. Tu n'es pas passé depuis des lustres." Son père accepte mon salut avec un sourire bienveillant. J'ai déjà rencontré le père de Phun plusieurs fois depuis que je viens si souvent chez lui. C'est juste que je ne l'ai jamais rencontré si tôt dans la journée. Ses parents ne rentrent généralement que très tard chez eux et ils ne respectent pas non plus un horaire précis.

    "Et que faisiez-vous tous les deux ? Vous êtes trempés." La mère de Phun demande après avoir accepté mon salut. Je lui fais un sourire gêné. Je sais que nous avons l'air d'avoir roulé sur une moto pendant le festival de Songkran. En fait, nous ne sommes pas trempés d'eau ou quoi que ce soit. C'est plutôt... assez mouillé pour que mes couilles soient froides. (Cette explication ne semble pas trop cotée M, n'est-ce pas ?)

    "Noh arrosait le jardin, mais il m'en a mis partout, maman. Regarde ça." Quelle commère ! Sérieusement ?! Pourquoi tu es un tel bébé ?!

    Alors comment je peux ne rien dire et lui permettre de m'attaquer sans me défendre ? "Ce n'est pas vrai, mère (2). C'est Phun qui se mettait en travers de mon chemin quand j'essayais d'arroser les plantes."

    Je ne sais pas pourquoi tout ça est drôle pour eux. Les deux parents ricanent, puis la femme d'âge moyen nous fait signe de partir. "Je pense que vous devriez aller mettre des vêtements secs maintenant. Noh, tu peux accrocher ton uniforme sur le balcon de la chambre de Phun. Attends qu'ils soient tous secs avant de rentrer chez toi. À moins que tu ne veuilles passer la nuit ici, mon chéri ?"

    "Oh… je ne pense pas que je le ferai. Je partirai une fois que mes vêtements seront secs."

    "Noh et moi, on monte à l'étage alors, si vous voulez bien nous excuser." Phun interrompt rapidement la conversation et me pousse le dos pour que je monte les escaliers. Son père prend la parole avant que nous puissions bouger nos pieds.

    "Reviens en bas une fois que tu auras changé de vêtements, Phun. J'aimerais discuter de quelque chose avec toi.

    "Oui..."

    Pourquoi son père a-t-il l'air si sérieux, je me le demande.

    Nous fermons la porte en bois sculpté derrière nous et nous jetons nos cartables sur le sol en moquette une fois que nous sommes entrés dans sa chambre. Le propriétaire de cette chambre est visiblement préoccupé par quelque chose.

    Je jette un coup d'œil à Phun qui prend son temps pour se déshabiller comme s'il essayait d'en gagner. Je n'ai pas le courage de lui demander pourquoi il agit ainsi. Je me demande pourquoi il semble si anxieux après avoir appris que son père veut lui parler.

    "Noh. Attends ici, d'accord ? Je vais aller lui parler et je reviens bientôt. N'hésite pas à utiliser l'ordinateur ou à te servir des consoles de jeux." Les consoles de jeux, sans aucun doute. Je lui fais un signe de tête et un sourire, en espérant que je puisse le mettre un peu à l'aise. Pourtant, c'est moi qui ne suis pas à l'aise. Comment puis-je l'être alors que le sourire de Phun semble étrange ? Il y a quelque chose qui cloche.

    "Je... t'attendrai ici, d'accord ?" Je me répète. Je veux qu'il sache que quoi que ce soit qui puisse le troubler, je serai toujours là pour le réconforter.

    Phun sourit largement avant de me prendre dans ses bras. "Ouais..." Il m'embrasse doucement avec ses lèvres oranges. "Je t'aime... Je reviens tout de suite."

    Malgré tout, je ne peux pas nier que le fait de voir son dos disparaître me met mal à l'aise.

    Est-il possible que je m'inquiète pour rien en ce moment ?

    ---------------------------------------

    BOOOOOOM !

    Tss, quelle bande de noobs ! Je m'appuie sur la chaise de l'ordinateur après que notre équipe ait réussi à détruire l'Ancien de l'ennemi pour la troisième fois de suite. L'équipe ennemie est composée de joueurs d'une autre école pour garçons près de Silom. Nous sommes de bons copains, vous voyez. Ils adorent tabasser les élèves de mon école chaque fois qu'ils se croisent au Siam. (Sérieusement, ils ont des problèmes !) C'est pourquoi nous avons décidé de leur botter le cul en ligne en guise de représailles. Hahaha. Nous ne sommes pas des poules mouillées, nous préférons la paix et l'amour.

    BEATdaRULEZ : Une autre partie ?

    Où diable ce satané Keng trouve-t-il son énergie ? Je ne veux plus jouer ! Je préfère faire autre chose maintenant, bon sang ! Alors que je m'apprête à le maudire, Dong me bat à plate couture.

    ollo : Mes yeux me font maaaaaaal, je m'en vais.

    nowayout : ok, on s'parle sur msn.

    Je coupe rapidement la conversation et quitte le jeu. Au même moment, une fenêtre MSN s'ouvre avec un message de Keng.

    Oh my congee and shabu shabu dit : Ils ont parlé d'un grand jeu mais ils étaient des putains de noobs.

    Oh my congee and shabu shabu dit : Repose-toi, ils sont à moi.

    Apparemment, il est toujours dans le jeu auquel nous venons de jouer. Ha ha ha. Je glousse en tapant une réponse dans la case rectangulaire.

    Noh dit : La partie est terminée, mais tu n'es pas encore passé à autre chose.

    Oh my congee and shabu shabu dit : Yeah !

    Oh my congee and shabu shabu dit : Attends, laisse-moi inviter Dong dans la convo.

    Moins d'une minute plus tard, Dong est invité à participer à la conversation.

    ++[ •Thailand Diseases National Association• ]++ dit : Bordel de merde ? Pourquoi tu m'as traîné ici ?

    ++[ •Thailand Diseases National Association• ]++ dit : J'étais sur le point d'aller prendre une douche mec.

    Oh my congee and shabu shabu dit : Attends, ne pars pas encore.

    Oh my congee and shabu shabu dit : Pourquoi te soucies-tu d'être propre maintenant ? Tu ne l'as jamais fait.

    ++[ •Thailand Diseases National Association• ]++ dit : Va te faire foutre ! Je suis toujours propre, tous les jours.

    Noh dit : Lol

    Oh my congee and shabu shabu dit : Merde, Noh. Ne reste pas assis là à te prélasser.

    Oh my congee and shabu shabu dit : Tu es où ?

    Euh... comment il le sait ? Il est vraiment capable tout comme son nom.

    Je reste stupéfait un instant, puis je décide de répondre par une question plutôt que d'avouer.

    Noh dit : Pourquoi ?

    Oh my congee and shabu shabu ditJe peux le sentir.

    Oh my congee and shabu shabu dit : Tu es chez Phun ?

    Merde, tu as été bien entraîné, n'est-ce pas ? Tu devrais aller travailler à l'aéroport et renifler de la drogue après avoir terminé tes études. C'est un meilleur avenir pour toi que d'aller à l'université.

    Noh dit : Ouais

    ++[ •Thailand Diseases National Association• ]++ dit : Eh ? Je croyais que tu rentrais chez toi aujourd'hui.

    C'est déjà bien assez que Keng m'ait attrapé, maintenant Dong ajoute une nouvelle blessure. Eh bien... J'avais prévu de le faire, mais... Je me tourne pour regarder la porte en bois sculpté pour la centième fois. Phun n'est toujours pas revenu.

    Noh ditJe suppose que je vais rentrer un peu tard...

    Oh my congee and shabu shabu dit : wooooooooooooo !

    Oh my congee and shabu shabu dit : wooooooooooooo ! Tu ne peux pas rester loin de ton petit ami, mon petit pote ?

    Noh dit : Va te faire foutre !

    Tu es aussi horrible qu’Ohm quand il s'agit de dire des conneries. Je glousse et je secoue la tête devant le long "looooooooooooool" de •Thailand Diseases National Association• et il se déconnecte pour aller prendre une douche. (C'est une douche, pourquoi diable faut-il être déconnecté pour ça ?) Maintenant, il n'y a plus que Keng et moi.

    Oh my congee and shabu shabu ditAh oui, Noh

    Noh dit : Quoi ?

    Oh my congee and shabu shabu dit : Il y a quelque chose que je voulais te demander depuis un moment

    Noh dit : Qu'est-ce que c'est ?

    Oh my congee and shabu shabu dit :  à propos de toi et de Phun.

    Oh my congee and shabu shabu dit : qu'est-ce qui se passe vraiment entre vous deux ?

    Hein...? Je reste complètement immobile après avoir lu le dernier message de Keng. Je cligne rapidement des yeux en relisant sa question pour la deuxième fois.

    Techniquement, je n'ai jamais expliqué ou été clair envers quiconque en ce qui concerne la nature de ma relation avec Phun. J'ai laissé les gars me taquiner jusqu'au bout. Parfois, je leur lançais des insultes, mais seulement parce que je n'étais pas encore habitué à l'idée d'être avec Phun. Mais dernièrement, je les ai laissés s'en tirer avec leurs commentaires. Je n'ai jamais vraiment avoué ou dit la vérité, pas même une fois. Parfois, j'oublie que les choses que mes amis disent ne sont que des taquineries. Elles viennent de personnes qui n'ont aucune idée de ce qui se passe vraiment.

    Oh my congee and shabu shabu dit :  si tu ne peux pas m'en parler

    Oh my congee and shabu shabu dit :  c'est bon, mec

    Je suis sûr que Keng est gêné par le fait que je ne lui en ai jamais parlé, d'autant plus que nous sommes des amis assez proches. Je dois admettre que ça doit être étrange de devoir apprendre la vie de son propre ami par quelqu'un d'autre. Et pourtant, vous n'entendez même pas la vérité de la bouche de votre propre ami.

    Je place mes doigts sur les touches, avec l'intention de taper une réponse. Et je l'aurais fait si je n'avais pas entendu le bruit de coups sur la porte.

    Toc, toc, toc.

    Phun ?! Je sursaute et je me retourne immédiatement pour regarder la porte comme si j'étais électrocuté. Il me suffit d'un bond pour atteindre la poignée de la porte et je la tourne rapidement. "Comment ça s'est passé ?! Hein...? Nong Pang ?"

    La personne qui se tient à la porte n'est pas le propriétaire de cette chambre, mais plutôt sa jeune sœur. Je suis stupéfait de ce que je vois. Des larmes coulent sur ses deux joues. Je la fixe, ne sachant pas quoi faire. "Nong Pang, qu'est-ce qui ne va pas ?"

    "Sniff… sniff… sniff..." Cependant, elle ne me répond pas. Elle essuie ses larmes avec ses petits poignets comme si sa vie en dépendait. Voyant cela, je la fais entrer dans la pièce.

    "Pang, n'essuie pas si fort comme ça. Tu vas laisser une marque." Je cherche une boîte de mouchoirs dans la pièce et la repère près de la télé. Je l'attrape et la donne à la fille devant moi immédiatement. "Là, là. Ne pleure pas."

    Nong Pang prend un mouchoir dans la boîte et essuie ses larmes avant qu'elle ne s'assoie. Ses épaules tremblent encore. " Sniff… sniff… sniff… P'Phun… P'Phun..."

    "Quoi à propos de lui ?" Tout est flou maintenant. Mon cerveau peut à peine reconstituer toutes les informations.

    Pang renifle et elle fait de son mieux pour débiter les mots. "P'Phun... se dispute avec papa..."

    "Ok, P'Phun se dispute avec papa. Pourquoi tu pleures ?"

    "Parce que je... c'est moi qui ai dit à P'Phun que... hic... que je... hic... je parlerais à papa pour lui... hic... mais je... hic... je ne peux même pas... hic... l'aider..." À ce stade, je commence à comprendre de quoi elle parle maintenant. Mon esprit est vide. Je n'ai pas la moindre idée de ce que je dois ressentir en ce moment.

    !!!!!!!

    Qui diable essaie d'attirer mon attention en ce moment ?! Tu parles d'un mauvais timing ! Je regarde l'ordinateur. Il y a une fenêtre MSN qui clignote, car quelqu'un vient de m'envoyer un message. Je m'approche pour le vérifier avec lassitude.

    OHM..............ohm........ dit : Tu peux m'envoyer le clip de nong pupae d'hier soir ?

    OHM..............ohm........ dit : Aun a effacé ma copie par accident

    OHM..............ohm........ dit : Putain de merde

    Demande à quelqu'un d'autre. Je lui dis en silence avant de me déconnecter rapidement et d'éteindre l'ordinateur.

    Nong Pang commence à se calmer un peu maintenant. Elle n'est plus hystérique comme tout à l'heure. Mais ses reniflements ne s'arrêtent pas tout de suite. Je m'approche pour m'asseoir à côté d'elle et je tapote doucement le dos de sa petite main pour la calmer. "Ça va aller, Pang. Il y a toujours un moyen de s'en sortir."

    "Mais si papa apprend pour vous deux ?!" Elle crie de sa petite voix remplie d'anxiété. Je laisse échapper un long soupir de soulagement. Cela doit signifier que les parents de Phun ne savent toujours pas pour nous.

    "Nous traverserons ce pont quand nous y arriverons, d'accord ?" Je lui réponds en souriant, en espérant qu'elle se calme enfin. "Ton P'Phun est génial, alors on doit avoir confiance en lui, d'accord ?"

    "Mais j'ai peur... Je t'aime bien, P'Noh... Je ne veux pas qu'il sorte avec quelqu'un d'autre..."

    "Si P'Phun m'aime bien, alors il ne sortira pas avec quelqu'un d'autre, n'est-ce pas ? Tu crois que P'Phun m'aime bien ?" La question est suffisante pour faire bondir la fille de son siège. Elle me donne une réponse claire et nette.

    "P'Phun t'aime plus que tout le monde entier !"

    "Si c'est le cas, alors pourquoi devrions-nous avoir peur, pas vrai ?" Je lui fais un grand sourire malgré le fait que je ressens tout le contraire à l'intérieur. Mais ça ne sert à rien que Pang s'inquiète de cela aussi. "Et si on allait manger ce gâteau ensemble ?"

    "Allons-y !" Heh. Apparemment, elle est aussi obéissante qu'un dauphin après tout. Utiliser la nourriture comme appât l'aide à se changer les idées.

    Je ris de son innocence. Puis, je me lève et lui prends la main. Notre destination est la boîte de gâteaux que nous avons demandé à tante Noi de mettre au frigo tout à l'heure. Cependant, Phun monte les marches quand nous ouvrons la porte.

    "P'Phun !" Pang crie fort le nom de son frère alors qu'elle court le serrer très fort dans ses bras. Je le regarde et il semble être épuisé. Néanmoins, il rend l'accolade à sa petite sœur. "Est-ce que tu emmènes P'Noh pour causer des ennuis quelque part ?"

    "Non... on descendait pour prendre du gâteau. Ça va, p'Phun ?"

    Ses yeux perçants sont troubles, mais ses lèvres peuvent encore se recourber en un sourire. "Bien sûr que ça va. Mais ça te dérange de prendre le gâteau toute seule ? J'ai besoin de parler à P'Noh de quelque chose." Je n'aime pas quand Phun se force à sourire comme ça.

    Nong Pang se retourne pour me regarder pendant un moment puis elle hoche lentement la tête. "Bien sûr... Je vais y aller. Bonne nuit."

    "Bonne nuit à toi aussi."

    Phun salue sa petite sœur avant de s'approcher de l'endroit où je me trouve une fois qu'elle a descendu les escaliers.

    Il me pousse à l'intérieur de la pièce, puis ferme la porte à clé. "Tu vas bien ?" Je lui demande une fois que je réalise comment il se sent vraiment maintenant que je le vois de près. Phun pince ses lèvres, puis il jette tout son corps dans mes bras pour me serrer dans ses bras.

    "Noh..."

    "Qu'est-ce... qu'est-ce qui se passe ?" Je suis un peu étonné, mais je le serre quand même dans mes bras. C'est là que je remarque que ses épaules tremblent terriblement.

    De sa voix grave et affaiblie, il commence à parler. "Reste avec moi cette nuit... J'ai vraiment besoin de toi."

    Il est impossible de le laisser dans cet état et de ne pas être affecté.

    Je ne serai jamais heureux si je ne suis pas aux côtés de Phun.

    ----------------------------

    Une demi-heure plus tard, Phun s'est endormi d'épuisement. Les gars, il faut que vous arrêtiez immédiatement d’avoir l’esprit mal placé. Il était épuisé après tout ce qui s'est passé aujourd'hui, sans parler du fait que son esprit s'emballe et qu'il se fait des idées. J'ai dû le calmer lentement pour qu'il s'endorme. (Non, je ne l'ai pas frappé et assommé.) Il était tellement stressé qu'il avait mal à la tête. Je me suis dit qu'un peu de repos serait la meilleure solution.

    Malgré cela, Phun a toujours l'air très stressé dans son sommeil. Je fronce les sourcils et décide de lui masser la tempe.

    Phun et son père ont eu une grosse dispute plus tôt dans la soirée. J'ai appris de Phun ce qui s'était passé après qu'il soit revenu. C'est là que nous avons réalisé que nous avons tous les deux oublié comment notre relation a commencé.

    C'est vrai, je parle du prétendu mariage arrangé de Phun. Pour être juste, ce n'est probablement pas le terme correct à utiliser puisque ses parents n'ont pas encore de fille qu'ils veulent associer à leur fils de dix-sept ans. Récemment, cependant, le fils d'un ami de son père, membre d'un parti politique, s'est retrouvé dans un scandale avec une fille et ils ont fini dans une chronique à potins d'un journal très important. C'était le sujet de conversation de la ville. Le fils a fini par être envoyé étudier à l'étranger, car il ne pouvait plus supporter de vivre dans ce pays. Naturellement, le père de Phun ne peut pas s'empêcher de penser à son propre fils après qu'une telle chose se soit produite si près de chez lui.

    Aucun parent ne serait prêt à exposer ses enfants à une humiliation publique. Certainement pas les Phumipats, une famille qui a toujours montré combien elle s'aime et se soucie des autres. Par conséquent, il n'est guère étrange que son père soit curieux de savoir qui son fils peut fréquenter sur le plan romantique et si cette personne peut faire du mal à Phun. Ce dernier est entre le marteau et l'enclume. Ce n'est pas si facile pour lui de dire la vérité, mais en même temps il ne peut pas revenir en arrière maintenant que Nong Pang a laissé échapper le fait que "P'Phun sort déjà avec quelqu'un".

    Plus il essaie de dissimuler les choses, plus celles-ci semblent suspectes. Je ne le sais que trop bien. Parce que tant que Phun continuera à être têtu et refusera de le dire à son père, cela ne fera qu'aggraver les tensions dans leur relation. Les deux hommes ont eu une horrible dispute, chaque partie s'opposant à l'autre. Alors que le père de Phun voulait savoir avec qui son fils sortait, Phun insistait sur le fait que l'amour était une affaire personnelle.

    La situation a empiré lorsque la querelle s'est transformée en désir de gagner. Le père de Phun a mis les pieds dans le plat. Si Phun ne dit pas à son père avec qui il sort, son père va supposer qu'il n'y a personne et il dira à sa secrétaire de trouver une gentille fille avec qui Phun sortira. Phun a finalement fait quelque chose qu'il n'avait jamais fait de toute sa vie. Par frustration, il a crié contre son père.

    "Si c'est ce que tu as l'intention de faire, alors autant que tu arrêtes de me considérer comme ton propre fils, tout de suite et maintenant !"

    Phun a regretté ces mots par la suite. Le Phun que je connais n'a jamais été mis au pied du mur et choisi de faire une telle chose. Je sais très bien qu'il est très déçu de lui-même.

    Je n'étais pas là. Je n'ai pas le droit de reprocher à Phun d'être allé trop loin ou non. La seule chose que je peux faire, c'est essayer d'être là pour lui. Bien qu'il ait eu le dernier mot, il est revenu en perdant. Je sais ce que Phun ressentait quand il a quitté ce couloir. Il ne s'agissait pas de surmonter le dilemme de savoir avec qui il sortait. Ce n'était pas la colère d'avoir été interrogé par son père. C'était de la honte. La honte d'avoir dit quelque chose de cruel à une personne qu'il aime.

    "Pendant tout ce temps, je ne lui ai jamais fait de mal. J'ai été obéissant. Je n'ai jamais joué la comédie. Je n'ai jamais rien fait pour l'inquiéter. Je sais que tout ce qu'il fait dans sa vie, il le fait pour Pang et moi. C'est pour ça que j'ai toujours fait de mon mieux pour le mettre à l'aise. Je veux qu'il me fasse confiance. Avoir foi en moi. Mais aujourd'hui... j'ai merdé et j'ai choisi de le blesser. Il y avait de la déception dans ses yeux quand il me regardait, et j'en étais responsable. Je suis déçu de moi-même aussi. Noh... Je n'aime pas du tout la personne que je suis devenue. J'aimerais pouvoir revenir en arrière et jeter celui qui était là, quel qu'il soit. Mais je ne peux pas. Je ne peux pas arranger ça."

    Il y a deux choses qu'on ne peut pas reprendre, les mots et le temps. Ces deux choses sont ce que Phun souhaite désespérément pouvoir récupérer. Mais quelles que soient ses capacités, c'est un exploit qu'il ne peut tout simplement pas réaliser. C'est particulièrement vrai pour une personne aussi nulle que moi.

    Je console Phun jusqu'à ce qu'il s'endorme enfin. Des traces de larmes sont encore visibles sur ses joues. Elles me rappellent constamment qu'il souffre autant que moi.

    Le clair de lune brille à travers les grandes fenêtres. La pièce est complètement silencieuse. Elle est vide et déprimante, contrairement à d'autres jours. Je prends doucement la main de Phun et je fixe la lune. J'ai la gorge sèche.

    "On dit que manger quelque chose de sucré peut éclairer l'humeur."

    Je repense à ce que Yuri m'a dit un jour et je ne peux pas m'empêcher de faire un petit sourire. Bien qu'on ne se soit presque jamais croisés depuis tout ce temps, Yuri est toujours capable de m'aider.

    Je décide de lâcher la main de Phun. Après avoir fermé la porte derrière moi, je descends au rez-de-chaussée, où tout est calme.

    Maintenant que j'y pense, ai-je pris une mauvaise décision en venant ici ? C'est silencieux. C'est tellement calme que je peux entendre l'horloge faire tic tac. Je regarde l'horloge du grand-père près des escaliers. Elle me dit qu'il est presque une heure du matin. Soudain, j'en ai la chair de poule. Bien sûr, il y a des esprits de la maison qui protègent les gens qui vivent ici, mais je ne vis pas vraiment ici. Les esprits me protégeront-ils quand même ?

    Mon esprit est en train de s'emballer. Je commence à chanter des prières en traînant mes pieds vers la cuisine. Bon sang, pourquoi je n'ai pas mis ces foutus gâteaux dans le frigo de Phun dès le départ ?! C'est ce que je récolte pour avoir essayé d'être mignon avec Tante Noi. 

    J'ouvre le congélateur et j'en tire trois boîtes de chocolat. Mon plan est de fuir cet endroit aussi vite que possible, mais c'est alors que mes yeux aperçoivent une ombre venant du salon, juste au moment où je m'apprête à remonter les escaliers.

    Uhhhhhhhhh ? Quelle est cette ombre ?!

    Mes pieds s’arrêtent automatiquement de bouger. Mon esprit débat entre la curiosité et la peur. Cependant, il semble que la curiosité soit en tête puisque je m'approche malgré le fait que l'autre moitié de mon cerveau me traite d'idiot et que je devrais simplement arrêter de prêter attention à ce qui se trouve dans cette pièce.

    Mais il est trop tard. Je suis juste devant le salon maintenant. Mes yeux commencent à s'adapter à l'obscurité et je vois...

    "... tu es toujours éveillée, mère ?" C'est la mère de Phun. Qu'est-ce qu'elle fait assise seule dans le noir, comme ça ?

    Elle semble tout aussi surprise de me voir, à en juger par la force avec laquelle elle sursaute. (Elle a donc eu peur elle aussi, haha.) Elle pousse un grand soupir de soulagement quand elle réalise que ce n'est que moi.

    "Et toi, Nong Noh ? Qu'est-ce que tu fais ici ? Ah… tu prends un en-cas de fin de soirée, je vois." Elle sourit quand elle obtient la réponse après avoir remarqué ce que j'ai dans les mains. Elle tapote le siège à côté d'elle et m'invite à m'asseoir. "Pourquoi tu ne viens pas t'asseoir, Noh ?"

    "Oui..." Je lui réponds en souriant, puis je m'approche pour la rejoindre.

    Nous restons assis en silence pendant un moment avant que la femme à côté de moi ne commence à dire quelque chose. Il y a une profonde inquiétude dans le ton de sa voix. "Nong Phun... est-il déjà au lit, mon cher ?"

    Je peux sentir comme mes lèvres sont sèches quand je lui réponds. "Oui, il dort."

    "C'est un enfant très sensible."

    "... il l'est."

    "Est-ce qu'il t'a dit quelque chose, Noh ?" Il n'y a que de la gentillesse dans ses yeux quand elle me regarde. C'est de là que Phun tient la sienne. Je ne peux jamais dire de mensonges quand ces deux yeux me fixent.

    "... il l'a fait." Ma voix est basse, presque un chuchotement.

    Ses lèvres se recourbent en un sourire avant qu'elle ne tourne la tête vers l'obscurité. Mais il semble qu'elle regarde bien au-delà. "Je ne les ai jamais vus se battre comme ça avant. C'était assez surprenant."

    "..."

    "Phun est un bon garçon. Il fait toujours ce qu'on lui dit de faire. Toujours prêt à faire tout ce qu'on lui demande, celui-là. Il est gentil avec tout le monde. Son père et moi l'aimons beaucoup. Chaque soir, je remercie les puissances, quelles qu'elles soient, d'avoir envoyé Phun pour être mon fils."

    "Je ne veux vraiment pas qu'il soit en colère contre son père. Son père l'aime beaucoup. Phun est un bon garçon. Il est bien élevé. Il n'a jamais causé de problèmes. C'est pourquoi son père et moi ne voulons que le meilleur pour lui. Je ne veux jamais qu'il fasse une erreur et qu'il soit confronté à quelque chose de terrible. Je sais que Phun a un bel avenir devant lui. Il pourra être fier au sein de la société. Et avant qu'il n'en arrive là, son père et moi voulons nous occuper de lui du mieux que nous pouvons".

    Mon esprit se vide quand j'écoute ses paroles. On dirait qu'elle veut enfin dire ce qu'elle pense. Je sens que mon amour pour Phun est minuscule comparé à l'amour que cette femme a pour lui. Il y a un sentiment inexplicable en moi. Je ne peux pas le nommer. Je ne sais pas ce que c'est exactement.

    "Nong Noh... tu ne peux pas me dire avec qui il sort, n'est-ce pas ?" Je sursaute quand j'entends ces mots. Je peux le voir dans ses yeux. Elle me supplie et je suis à deux doigts de céder à sa demande. Cependant, je ne suis pas en mesure de parler en son nom.

    "Si… Phun ne veut pas en discuter, alors je ne pense pas que je le devrais non plus..."

    Elle pousse un nouveau soupir. "Quand même... je suis content qu'il t'ait comme ami."

    La belle femme me fait le sourire affectueux qu'elle me donne souvent. "Je crois que tu vas pouvoir l'aider à traverser cette épreuve. Je vais devoir le laisser entre tes mains cette fois-ci." Elle bouge sa main chaude pour saisir la mienne. Je sens qu'elle me fait confiance sans aucun doute dans son esprit.

    "Veille sur lui pour qu'il ne connaisse que l'amour qu'il mérite pour être une bonne personne."

    "... oui, mère." Je lui réponds doucement en lui donnant ma parole. Au fond de moi, je sais que je suis probablement trop jeune pour comprendre tout cela. 

    Qu'est-ce qu'un bon amour exactement, mère ?

    Et s'il y a quelqu'un qui aime sincèrement votre fils de tout son cœur, mais que son amour n'est pas considéré comme la norme ?

    Et si son amour pour votre fils est quelque chose qui n'est pas acceptable selon les normes sociales ?

    Est-il toujours considéré comme un bon amour ?



    1- Clorets : Marque de chewing-gum.

    2- Mère : En Thaïlande il n’est pas rare d’appeler les parents de ses amis en tant que mère/père.

     

    Chapitre 55 : Suis-je...?

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